Il est établit lors d'une déclaration faite par divers habitants en date du 24 août 1739 que : "...la pièce de la Vergne, à présent possédée par M. Guillaume Mayaudon de Chadriac, juge du présent lieu, n'a jamais été une Isle ni tarissement (atterrissement) ; que si elle se trouve entourée d'eau, cela provient de ce que le seigneur de Montmège, lors possesseur de la dite pièce, fit faire un grand fossé pour détourner l'eau de la rivière de Vézère aboutissante, pour la construction d'un moulin qui est encore nature, dont la chaussée joint à la dite pièce, et qu'ensuite on se servit du même détour lorsqu'on a basti le pont situé au dessus du lit du moulin, joignant à la dite pièce de la Vergne, de sorte que par ce moyen, ce fossé devint, par le cours des eaux, d'une profondeur et largeur assés considérables, et les dits sieurs sus-nommés ont veu depuis que lors qu'il survient des croissants d'eau par des orages ou pluyes abordandantes, ce contour reçoit les eaux qui découlent, et la dite sus-nommés attestent sincère et véritable pour le savoir tant par tradition que pour l'avoir veu par eux-mêmes..."
Ce lieu sous la domination de l'abbaye bénédictine est constitué d'ouvrages établis sur la rivière comme un moulin banal fondé par l'abbaye avec une digue en aval du pont permettant le passage de la Vézère.
Pour ce qui est du pont un agent (Charles Durand) des ponts et chaussées en 1805 en fait cet historique : " D'après les connoissances que j'ai prises de la première fondation du pont de Terrasson, on m'a dit et assuré qu'on n'avoit auqune date certaine de sa fondation et qu'on présumoit qu'il avoit été fondé lors du passage de Cézard dans les Gaules et qu'on s'appuyoit d'une assertion qu'il leur paroissoit fondée par ce que, lors de la fondation de l'abbaye baptise en faveur de St-Sour, remontant au sixième siècle, le pont étoit bâti et qu'il paroît qu'il a été réédifié sur ses fondements par une pierre totalement différente."
D'autre part, il est certain que la voie antique Lyon-Vésone traversée Terrasson et la Vézère en lieu nommé le "gué" un peu en amont de la digue du moulin.
En 1091, Geoffroy, prieur de Vigeois nous apprends que l'abbaye de terrasson suite à des désordres est soumises à l'abbaye de Saint Martial de Limoges.
Vers 1150, les moines construisent pour leur besoin une église romane et demande leur indépendance mais celle-ci se retourna contre elle et ils manquèrent de tout.
En décembre 1182, Geoffroy signale la venue de troupes à la solde du vicomte de Limoges pour envahir le Limousin en passant par le pont de Terrasson.
En 1178, Raymond, abbé de Terrasson vend à l'abbaye du Salon trois mas ou domaines ruraux et deux métairies pour payer les dettes du monastère.
On sait donc de source sure que le pont existait en 1182 et, il est vraisemblable que les ventes effectuées à l'abbaye du Salon en 1178 aient contribué payer les dettes occasionnées à la construction de l'ouvrage.
De nombreuse analogies apparaissent avec les ponts médiévaux de Limoges : Saint-Martial et Saint-Etienne et nous pousse à y voir un maître d'oeuvre venu de l'abbaye de saint-Martial. Cette construction remonterait de notre dépendance Limousine, on sait d'ailleurs que le pont Saint-Martial fut détruit en Mars 1183 et que celui de Saint-Etienne n'existait pas encore. Si notre pont de Terrasson est contemporain c'était à celui de Saint-Martial d'avant 1183, Saint-Martial fut reconstruit au XIII° siècle ainsi que l'édification de Saint-Etienne. Il est certains que la construction d'un tel ouvrage nécessite une période calme et prospère et la population de Terrasson n'étant pas assez importante à cette époque n'aurait pu subvenir à réaliser un tel édifice. Il est presque évident que sa construction remonte à la première moitié du XII° siècle et son influence Limousine.
Ce pont comme souvent à l'époque a du avoir un système de péage qui permettait son entretien mais nous n'en avons aucune traces et celui-ci n'a probablement pas perduré suite aux guerres de cent ans et de religions qui ruinèrent l'abbaye qui ne pouvait plus subvenir à un tel entretien qui passa à la charge du fond des ponts et chaussées.
Les guerres anglaises portent le premier coup au pont dont les deux premières arches de la rive droite sont abattues. L'abbaye, le château abbatial sont pillés et le moulin rasé. On sait que dans un mémoire daté de 1502 que le château de Terrasson est détruit et dans un autre en date de 1530 : " le château de Terrasson est ruiné depuis cent ans, sans fossés, portes et fenêtres...". Le moulin sera relevé en 1537 soit prés d'un siècle après les guerres anglaises.
C'est au cours du XV° siècle que l'abbé de Terrasson, Bertrand de Roffignacrelève l'église et que vraisemblablement le pont fut restauré par deux arches en arc de cercle surbaissées que nous connaissons aujourd'hui.
On retrouve des mentions du pont en 1650, en 1652 et le 9 janvier 1653 ou une petite escarmouche a lieu proche de la maison au bout du pont. Hector d'Aubusson, maréchal de camp des armées du roi, seigneur de Castel-Novel fit rompre la 4° arche à partir de la rive gauche afin d'éviter les troupes du prince de Condé de se diriger vers Badefols :
"...quelques jours après, Monseigneur de Castelnovel, accompagné des communes de la terre d'Ayen, sont esté rompre la grande arcade du pon de Térasson.
Averties du danger, les troupes de Monsieur le Prince sont revenues à Térasson, deux jours après, et ont remis le pon avec de grands arbres, et M. De Pompadour ayant de rechef assemblé les trouppes du Roy voysines et fait grand employ, et iceux assemblés le samedy premier de mars et le Lundy troisième, auraient passé la Vézère à las Eycuras, à gay, et les piestons avec des batteaux qu'il avoit fait presparer et voyant, ceux de Térasson, qu'ils ne pouvoyent résister, auroit rompu ce qu'ils avoyent remis du bon et pris la fuitte. Ledit Seigneur de Pompadour fit achever de rompre le pon, le jeudi 6 du mois de mars".
Le 1° juin 1657, Jean de Reilhac de Montmège prend possession de l'abbaye qu'il fit réparé ainsi que l'arche du pont en forme de plein cintre.
Croquis extrait du recueil de cartes, plans et profils des ouvrages faits pour la navigation de diverses rivières en Guyenne, levez par M.Ferry dans la visite qu'il en a faite à la fin de l'année 1696. Archives départementale de la Gironde.
On sait qu'en 1720, l'état du pont est jugé fâcheux et un projet de réparation est confié à l'ingénieur Ubeleski en 1722. Les finances de l'état ne pouvant suivre, il fallut porter la demande auprès du roi et leur adjudication fut faite le 5 juillet 1725. On note également ne date du 10 janvier 1746 et le 26 février 1748 des réparations pour un avant bec du pont.
En 1790, un corps de garde est élevé sur le refuge en amont de la première pile du pont : " En 1790, on dut seconder l'enthousiasme des gardes nationales. On fit emplette de fusils, de gibernes, de drapeaux et de tambours. On se procura une pièce de 4 qui fut montée sur son affût. On éleva sur un des avant-becs du pont, un bâtiment : un Rez de chaussée et un étagera dessus qui servit longtemps de corps-de-garde et de prison, qu'on loua plus tard au profit de la commune, et dont la démolition n'a été provoquée par l'administration des ponts et chaussée que depuis quelques années ; pour finir à ces dépens, la commune n'avait pas un centime de revenu ; on abattit les plus beaux saules de la place des barres, des ormeaux de la route, et leur produit réuni à quelques contributions volontaires, servit à couvrir la dépense."
De nouvelles réparations du pont seront exécutées en 1783 suite à la crue exceptionnelle de cette même année. Le montant des travaux s'élève à 10 000 francs. On pense que ce montant assez important inclus très probablement la transformation des avants-becs en arrondi.
Au dessus du pont se trouve la digue du moulin appartenant à la famille de Limoges, en effet Jean-Louis de Montmège vendit par contrat le 2 avril 1754 sa part au sieur Jean de la Reynaudie, bourgeois et marchand de Terrasson, part que ses descendants vendent le 3 décembre 1775 à noble Jean Limoges-Despériers, gendarme de la garde du Roy. De son côté, l'abbé de Terrasson le 16 septembre 1788 par un bail perpétuel, au dit sieur de Limoges acceptant la moitié des moutures du moulin.
Cette digue de 1,57 mètre de chute composée d'une partie en charpente et d'une autre de moellons est la cause de l'amincissement des eaux ce qui est nuisible à la navigation. De plus, elle provoque des creusements au niveau des piles du pont qui ont du être restaurées. La question de maintenir cette digue ainsi que le moulin est posée surtout qu'une digue existe déjà en dessous du pont pour maintenir les eaux.
La physionomie de ce pont sera modifiée par le nouvel axe de communication Lyon-Bordeaux, pour cela en 1810 seront démolies l'auberge Lanoix dite "chapeau rouge" en amont de l'ouvrage et en face en aval les maisons et grange Ravel et Chapelle. Cet ensemble formait un passage étroit et dangereux pour la circulation : " afin de donner au grand pont de Terrasson dont la voie est trés étroite, toute la visibilité et la sureté que comporte le passage de ce point, il est absolument nécessaire de faire démolir : - Une petite tour octogonale de 2 à 3 m de diamètre, sise à l'entrée du grand pont de Terrasson et attenante à la maison Bouquier, culée droite du grand pont. - Un petit corps de garde appartenant à la ville de Terrasson, lequel a été construit en 1790 sur la première pile, tête amont de la rive gauche du grand pont."
La démolition de la petite tour attenant à la maison fit l'objet d'une réclamation d'indemnisation de la part de Bouquier. Cette petite tour pose la question sur l'origine de sa présence : tour de défense pour l'entrée du pont ou avez-t-elle une fonction de péage ? Le 9 janvier 1812, quelques noms de Terrasson ( Bouquier, Chabrelie, Montmège,Franche, Beunet, Tuilieras) nous dressent un portrait de cette tour et de la Vergne : "...Que l'isle de la Vergne, attenant au pont de Terrasson, ne formoit qu'une prairie appelée le pré de l'abbé et faisoit partie du domaine de l'abbaye de Terrasson. Que cette isle formée par le Brasset qui fut ouvert, suivant la tradition, lors de la construction du pont et du moulin de Terrasson appartenant aussi à l'abbaye, fut aliénée pour la rançon de François I°, roi de France, fait prisonnier à Pavie, le 24 février 1525, et l'abbé de Terrasson n'y conserva que la directe sous la redevance d'un cens modique. Que la tour qu'on vient de démolir étoit liée avec le pont de manière à faire penser qu'elle fut construite en même temps, et l'écusson des armes de l'abbé que l'on voyoit sculptées au-dessus de la porte d'entrée, en attestoit assez l'ancienneté, conforme à la tradition transmise par les anciens bâtiments de Terrasson..."
Cette tour attenante à la maison possédée au dessus de sa porte d'entrée un écusson aux armes de l'abbaye de Terrasson représentant un abbé coiffé d'une mitre tenant une crosse de la main droite et deux clefs en sautoir de la main gauche portant la légende S.B (Sanctus Benedictus - Saint-Benoit) patron et fondateur des bénédictins.
Le pont vieux malgré des travaux au fil des siècles devient de plus en plus dangereux, sa solidité est mise en question, il sera même recouvert d'une épaisse couche de sable en 1824 ce qui rebuta les voyageurs de l'emprunter car les parapets de celui-ci devenaient plus bas. Pour régler ce problème de dangerosité et allier une circulation plus importante, il sera approuvé le 5 février 1830 un projet exécuté par l'ingénieur en chef Cousin de construire un nouveau pont, celui-ci sera ouvert à la circulation début 1833. Le pont vieux encore une fois en mauvais état n'est plus utilisé, il est destiné à la démolition en 1904 mais sera sauvé cette même année et classé aux monuments historique.
Cette ile dite de la Vergne anciennement " le pré de l'abbé " tire son appellation des arbres présents : les Vergnes de son vrai nom l'aulne qui apprécie ces lieux humides. La maison du pont vieux à probablement des bases anciennes remontant elles aussi à l'exécution de tout cet ensemble que sont le Brasset, le pont, le Moulin, la tour hexagonale et la digue au cours du XII° siècle.
En l'état actuel des choses, aucun éléments sur place aujourd'hui ne peut nous le confirmer. Par contre nous connaissons sa présence au XVII° siècle et ses propriétaires successifs depuis le milieu du XVIII° siècle.
Nous connaissons en 1739 un Guillaume Mayaudon de Chadriat puis le 31 octobre 1768, la maison est vendue par Antoine Mayaudon de Chadriat à MM. Martial, Gabriel et dame Anne Bouquier, frères et soeurs. Après testament est décès la maison reste dans la famille par une des soeurs Bouquier, Gabrielle Bouquier, épouse de Jean-Baptiste-Joseph Ducru.
Cette maison à l'entrée du pont, propriété des Bouquier au XVIII° siècle est connue comme hôtellerie sous le nom de : " palais royal " et sert probablement de relais de poste. Elle sera même un moment une gendarmerie.
Ducru meurt le 25 juillet 1879 et laisse comme héritière sa soeur Louise-Amélie-Zéloé Ducru, épouse d'Armand Ravey. Celle-ci décède en 1880, l'ile de la Vergne et la maison sont attribuées à Marie-Louise-Jeanne-Joséphine de Pichard de Latour épouse de Paul-Louis Carbonnier de Marzac demeurant à Bordeaux.
La maison sera ensuite achetée par Mr. Jean Alfred Lavaysse le 6 mars 1882 pour la somme de 15 000 francs. À son décès le 21 juin 1904 son épouse Mme Lavaysse née Laserre de Monzie en est pleinement propriétaire.
Le 2 janvier 1909, Mr. Anatole de Monzie rachète la maison à sa tante qui s'en réserve l'usufruit ainsi qu'une rente viagère jusqu'à son décès le 6 octobre 1919. Anatole de Monzie en devient propriétaire, né en 1876, homme politique, il sera à plusieurs reprises ministre des finances et de l'éducation nationale ainsi que président du conseil général du Lot. Jeune, il passe ses vacances à Terrasson dans la maison du pont chez son oncle et sa tante et fait une partie de ses études avec son ami Henry de Jouvenel. Aujourd'hui encore on peut voir sur le portail de la propriété un "L" correspondant à " Lavaysse ".
Il cède cette maison le 9 octobre 1919 à Mme Debraud. Pour cela, il passe par un mandataire en la personne de Mr. Roubinet, négociant et propriétaire à Terrasson. Cette vente est réalisée pour la somme de 18 000 francs.
Cette maison est décrite lors de la vente comme : " villa Gabrielle ", construite en pierres de taille, couverte en ardoises, sise à Terrasson, à l'extrémité du vieux pont, au lieu dit " l'ile de la Vergne ". Ladite maison est composée de sous-sol, étage et grenier, confronte le vieux-pont, le rivière Vézère, la voie publique et la parcelle de terrain ci-aprés désignée. Une parcelle de terrain qui longe la rivière Vézère du côté du midi et du côté du levant, confronte la Vézère, au midi et au levant, la maison dessus désignée au couchant, et les possessions Ségéral, au nord. Ainsi au reste que les immeubles ci-dessus désignés se poursuivent, s'étendent et se comportent en ce moment, ils sont vendus avec tous leurs droits de servitudes actives, passives apparentes ou occultes, continues et discontinues, pour la maison d'habitation, avec tous objets cloués et scellés à perpétuelle demeure ; et pour la parcelle de terrain, avec son plus ou moins de superficie, sans aucune exception ni réserve. "
Il semblerait que certaines pièces de cette maison furent louées à plusieurs reprises au bureau de l'enregistrement avec un logement pour Mr. Peyrol agent de ce bureau vers 1947 ainsi qu'à un autre couple de fonctionnaires.
Mme Debraud revend la maison avec le parc en 1955 à un avocat marocain de Casablanca. Celui-ci fera quelques travaux dans seulement 3 ou 4 pièces de la maison et ne viendra que pour les vacances.
C'est en 1960 que Mr. et Mme Laplanche font l'acquisition de la maison à cet avocat marocain.
Aujourd'hui, la maison dite "Laplanche" ainsi que son parc sont la propriété de la commune.